Mohamed SNEIBA

Si le cri vient de la montagne où fuir ?

Brahim Ould Daddah, ministre mauritanien de la Justice
Brahim Ould Daddah, ministre mauritanien de la Justice

Je sais que ce n’est pas moi ou un autre qui empêchera le président Aziz de faire un troisième ou un quatrième. Mieux, les mauritaniens ne lèveront même pas le petit doigt pour s’opposer à la volonté de celui qui a réaliser l’exploit de faire deux coups d’Etat en l’espace de deux ans ! Certes, on aura droit aux gesticulations d’une opposition pressée de goûter, elle aussi, aux délices du pouvoir mais ça s’arrêtera là. Noua n’aurons droit ni à un « printemps arabe » ni à un « harmattan africain ».
Ceci dit, il est inconcevable que le ministre de la Justice, un avocat de formation, vienne devant les députés et les incite, en termes très clairs, de demander au président Aziz de « forcer la porte » du troisième mandat. Le très zélé ministre des Affaires économiques et des finances a tenu le même propos quarante-huit heures plus tôt, au moins, mis la forme : « le camouflage ». Interpellé par un député de l’opposition, il avait précisé avoir dit que le peuple pourrait ne pas laisser partir un président qui a fait tant de réalisations ! Aux protestations de l’opposition, Ould Daddah (le ministre de la justice, pas le juste, l’opposant Ahmed), déclare : « Je suis un homme politique ». Entendez, « je dis ce que je veux pour plaire à mon maître. »
Il oublie, notre cher ministre de la Justice que le président de la République a juré de ne pas modifier les articles de la Constitution limitant son mandat ou de soutenir ceux (députés, ministres ou autres) qui œuvrent pour un projet si funeste. Alors ?


Bamako, Ouagadougou, Abidjan : du terrorisme à la terreur ?

Moctar Belmoctar, chef d'Aqmi (photo : google)
Moctar Belmoctar, chef d’Aqmi (photo : google)

L’attaque sur la plage de Grand Bassam fait au moins 16 morts. Elle a été revendiquée par Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI) qui, de ce fait, signe un tiercé macabre avec trois attentats dans trois capitales ouest-africaines : Bamako (21 morts), Ouagadougou (30 personnes) et Grand Bassam, station balnéaire près d’Abidjan (16 morts). La stratégie des djihadistes est maintenant très claire : passer du terrorisme à la terreur. De la crainte qu’AQMI (ou Boko Haram) suscite chez les gouvernements visés à celle qui trouble la quiétude des populations dans ces pays. L’effet est là : certains d’avoir perdu la bataille militaire, les djihadistes veulent occuper le terrain médiatique. Un gain médiatique énorme qui permet à l’organisation terroriste de maintenir un semblant de vie par le nouveau règne de la terreur.

Avec l’échec de son idéologie de guerre « djihadiste », en Afghanistan, en Irak et en Algérie, à la fin des années 90, Al qaeda passe du terrorisme à la terreur alors que, historiquement, c’est la dernière qui a été conceptualisée, en politique, pour aboutir au premier.  La distinction qu’en donne Zeinab Abdelaziz est admirable.

« Car, du point de vue étymologique, le mot terreur, emprunté au latin classique terror, vers 1356, veut dire « effroi, épouvante » et par métonymie, « objet inspirant de l’effroi ». Il est employé pour le sentiment de peur intense, d’où terreur panique (1625), et pour l’objet qui l’inspire. Depuis 1789, le mot désigne l’ensemble de moyens de contrainte politique, maintenant les opposants dans l’état de contrainte. La Terreur est le nom donné au régime instauré en France entre juin 1793 et juillet 1794, pendant lequel des mesures d’exception furent en vigueur, obligeant les citoyens à obéir aux ordres du gouvernement révolutionnaire. Les quelques dérivés de Terreur datent de cette époque révolutionnaire. Terrorisme, emploi attesté depuis 1794 au sens de régime de terreur politique, parallèlement à terroriste, celui qui maintient ou opte pour ce régime.

Du point de vue historique, le terme de Terreur désigne tout régime politique ou mode de gouvernement basé sur cette grande peur, généralement entretenu par des mesures despotiques et par des violences. Viennent ensuite les variantes de Terreur rouge, pour un système véritable d’État, méthodique, qui prend l’habitude du sang. Et Terreur Blanche, pour désigner les journées qui firent régner les royalistes, en France, dans le Sud-Est, au printemps et en été 1795, contre les bonapartistes.

Tel qu’on vient de le voir, le mot Terreur et tous les dérivés qui en découlent, sont intimement liés à la politique.

Car « le Jihād en Islam, même dans le sens limité au combat ou guerre, prohibe de commencer l’attaque, précise de ne point porter atteinte aux vieillards et aux enfants, de ne combattre qu’avec les combattants en état de mener la lutte, de ne point démolir, saccager ou incendier. C’est un code d’honneur, de vraie Chevalerie, dans le profond sens du terme. Un code d’honneur qui précise : la réplique ne doit jamais dépasser le niveau de l’attaque ; le combat ne doit jamais être mené que dans l’optique de la défense : la défense de soi, de la patrie ou de la religion. »

 

 


Peuple de « zéhéros », le train Mauritanie déraille

Le train minéralier de la Snim réputé être le plus long du monde.
Le train minéralier de la Snim réputé être le plus long du monde.

La farce n’a que trop duré. Je parle de notre « démo-gâchis ». Je ne reviendrai pas sur l’Ere Taya parce que celle du président Aziz suffit largement pour illustrer le propos que je tiens. Certains me diront même que ce que nous vivons aujourd’hui n’est que le prolongement de nos déboires d’hier. Et ils ont raison. La « révolution » de 2005¹ n’a pas été une rupture et la « révolte » d’août 2008² encore moins. Il y a des choses qui refusent de mourir et d’autres qui n’acceptent pas de naître, comme disait l’autre. Le statu quo est le maître mot. Certains lui donnent, à tort, le nom de « crise » oubliant que celle-ci est un état passager. La nôtre est devenue notre normalité. Le dialogue que nous réclamons sera l’exception. Tout comme le redressement d’une économie exsangue, l’apaisement de la scène sociale et la séparation des pouvoirs qui est l’essence même de la démocratie.

Nous devons savoir que le jour où la politique (notre chère « bolletig ») ne peut plus nourrir son homme est proche. Avec ce régime, le cercle des privilégiés se rétrécit comme peau de chagrin. Et celui des mécontents s’élargit de jour en jour. Un système de vases communicants. Aziz est-il conscient que sa politique est en train de créer un nouveau profil : l’opposant dans la majorité qui est un peu le répondant de « l’opposant » (taupe) dans l’opposition ? Le premier peut être un « ministré », un homme d’affaires, un directeur ou chef de projet nostalgique du temps du « tbowdigh » (la bombance), comme dirait un griot de chez moi qui, après plusieurs années passées dans le camp de l’opposition, découvre subitement le faste factice de l’ère Taya.

La majorité d’Aziz a tendance de ne plus le servir parce qu’elle ne peut plus se servir. Au nom d’une soi-disant lutte contre la gabegie, la redistribution des biens usurpés ne profitent plus qu’à un cercle restreint. Les marchés de construction de routes, les nominations aux postes « juteux,  l’import-export, les devises, les passe-droits de toutes sortes» sont devenus la « chose » du premier cercle du pouvoir. Il faut être dedans ou dehors.

Ceux du « dedans » se livrent une guerre sans merci pour défendre leurs places. Demandez au ministre de l’Economie et des Finances, devenu une sorte de Premier ministre bis, comment il a fait pour « renverser » Ould Rayess. Regardons les agissements de ceux qui se réclament du ministre secrétaire général de la Présidence, Moulay Ould Mohamed Laghdaf, et les répliques « telluriques » du clan du Premier ministre Yahya Ould Hademine. Les titres de « docteur » et « d’ingénieur » se télescopent souvent dans cette lutte de positionnement dans le cercle du « dedans ».

Ceux du « dehors » ne sont pas en reste. C’est parce qu’il n’y a pas d’amitiés en politique qu’on peine à avoir une opposition. Nos partis politiques se confondent avec leurs chefs. APP, Tawassoul, RFD, UFP, Hatem, PLEJ, Al wiam, AJD/MR, et j’en passe. Résultat : nous avons des oppositions dont la « résistance » au pouvoir se décline en intérêts fluctuants. Quand les uns boycottent les élections, les autres y courent allégrement. Quand la CAP (coalition pour une alternance démocratique) dit oui au dialogue, en 2011, la COD (coordination pour une opposition démocratique) choisit le non. Le même scénario s’est répété il y a trois mois occasionnant un « froid » entre le RFD et le reste du FNDU³. Et quand ce dernier a marché pour montrer qu’il a toujours une capacité de mobilisation (et prouver sans doute que la « sortie » du RFD a peu d’incidence sur lui), le parti d’Ahmed Ould Daddah a répliqué en organisant un meeting monstre qui le fait revenir dans les enchères politiques. Les « oppositions » oublient ainsi qu’il y a un pouvoir en face d’elles. Elles font passer le futile avant l’utile. Les querelles du « dehors » amusent le « dedans » et lui donnent du répit. Il peut remettre à plus tard le dialogue, prolonger indéfiniment la vie d’un sénat dont certains élus siègent depuis 2007 ! Il peut créer et recréer des structures sans intérêt pour le peuple mais lui permettant, lui, d’accueillir, les nouveaux « arrivages ». Oui, on est en pleine ère de la médiocrité. Pour assurer le fonctionnement de son train, le président Aziz a le choix entre des pièces usées et celles « made in China ».

1. Coût d’état contre Taya mené par le colonel Aziz.

2. Coup d’état contre Sidi mené par le même Aziz devenu général.

3. Forum national pour la démocratie et l’unité.


«J’ai servi 63 ans ce pays qui me prive d’un passeport», récit d’un octogénaire

Djibril Zakaria Sall, Commissaire principal à la retraite (photo : cridem)
Djibril Zakaria Sall, Commissaire principal à la retraite (photo : cridem)

«On me prive de mon droit d’obtenir un passeport, après que j’ai servi mon pays pendant 63 ans, 9 mois et 23 jours», s’indigne un vieux de 77 ans, promotionnaire de deux anciens présidents mauritaniens, à savoir Mohamed Khouna Ould Heidalla et le colonel Mahmoud Ould Loli.

L’octogénaire, ou presqu’octogénaire, du nom de Jibril Zakaria Sall raconte d’abord, à Alakhbar, son vécu « paisible» dans son village à Haayré Mbar, situé à 30 kilomètres de Boghé, depuis sa retraite: « J’ai deux amis: mon chapelet et mon jardin que j’arrose tous les matins ».

Djibril Zakaria Sall rappelle d’ailleurs son habitude de raconter à ses enfants: « Combien j’ai servi ce pays ! J’ai eu à occuper plusieurs postes de responsabilité tant sur le plan sécuritaire que culturel».

Aussitôt, un sentiment de colère s’invite dans les souvenirs de l’octogénaire : « J’ai jamais pensé qu’un jour ce pays, que j’ai tant servi, me privera d’un passeport pour passer quelques jours chez mon fils aux Etats-Unis»

Le calvaire du vieux Djibril commence en décembre dernier, après que le centre d’état civil de Sebkha (Nouakchott) a rejeté sa demande d’obtenir un passeport.

“Je leur ai présenté les papiers (d’enrôlement à l’état civil biométrique) de mes sept enfants qui vivent en Mauritanie en plus des papiers d’enrôlement d’un petit frère.

Mais ils (état civil) exigent encore les papiers de mes quatre autres enfants qui vivent à l’extérieur. Ces derniers ont dépassé la quarantaine et s’occupent plutôt de leur vie. Je ne sais pas s’ils se sont fait enrôler»

Et le vieux Djibril de s’étonner : «Comment peut-on exiger à un père de prouver sa nationalité à travers les documents de ses enfants et non le contraire ! »

L’octogénaire va toutefois accepter de signer, sur demande de l’état civil, un engagement de présenter, dans l’avenir, les papiers d’enrôlement de ses enfants vivant à l’étranger. «Mais mon engagement n’a pas empêché un second rejet de ma demande, le 26 février dernier ».

Jibril Zakaria Sall dit n’avoir pas une explication de ce qui lui est arrivé, mais promet: « Je ne permettrais à personne de douter de ma mauritaniété. Je suis plutôt un modèle à copier dans ce pays. C’est ceux qui m’ont empêché d’avoir mon passeport qui doivent douter de leur mauritaniété»

Je suis né à Rosso, le 23 avril 1939. Mon bulletin de naissance c’est le numéro 11 de l’année 1939.

Tout le monde me connait dans ce pays. Je suis le promotionnaire du président Mohamed Khouna Ould Haïdallah. Nous avons fait le collège Xavier Coppolani de Rosso. Et j’ai été dans la même classe que le colonel Mahmoud Ould Loli.

Je suis également écrivain et poète. Les étudiants de la Faculté des Lettres de l’Université de Nouakchott travaillent mes textes, depuis 2008.

J’ai représenté la Mauritanie à la CEDEAO pendant 12 ans comme directeur du Département des affaires sociales et culturelles.

J’ai était détaché au Ministère de la Culture de 1975 à 1977 pour le Festival des Arts Nègres.

J’ai signé moi-même des passeports en tant que directeur adjoint de la Sûreté.

J’ai été commissaire central de Nouakchott. J’ai été commissaire de police de Zoueirat, de Rosso, d’Atar et directeur régional de la Sûreté à Atar.

J’ai été chef de la brigade mobile d’Aioune en 1963. J’ai était directeur de la police judicaire et directeur de la Sécurité publique».

Face, aujourd’hui, à « l’injustice » dont il se dit subir, le vieux Jibril Zakaria Sall brandit cette arme: « Je vais rester chez-moi, comme j’ai fait depuis ma retraite. Je vais arroser mon jardin et égrener mon chapelet ».

Alakhbar a rencontré le vieux Jibril Zakaria Sall, vendredi 4 mars, au lycée de Sebkha, où il dispensait un cours d’Anglais bénévole à des élèves.

 

Source : alakhbar


Drogue/Dossier 101 : les chainons manquants

Le cerveau présumé de l'opération : Sidi Mohamed, fils de l'ancien président Haidalla.
Le cerveau présumé de l’opération : Sidi Mohamed, fils de l’ancien président Haidalla.

La drogue a été, encore une fois, le sujet principal en Mauritanie au cours de ces dernières semaines. La nouvelle affaire enregistrée auprès du parquet général de Nouakchott sous le nom de « dossier n°101/2016 », concerne un vaste réseau de trafiquants (17 individus, de diverses nationalités), selon le ministère mauritanien de l’Intérieur. La quantité saisie, toujours selon les services de sécurités, est de 1,3 tonne de drogue, introduite en Mauritanie par embarcation, à partir de Lagouira, une enclave marocaine aux portes de Nouadhibou, vers la localité de Lemhayjratt, à 120 km au nord de Nouakchott.  

 

La nouvelle affaire ramène dans les esprits d’autres dossiers de narcotrafic dont les vrais contours n’ont jamais été élucidés, notamment le dossier connu en 2007 sous le nom de « l’avion de la drogue ». Et comme ce dossier a été clos de manière étrange, la nouvelle affaire pose des questions restées jusque-là sans réponses. De sorte que des observateurs croient, dur comme fer, que la présente affaire est appelée à suivre la même voie que celle de ses précédentes et notamment la rocambolesque « affaire de l’avion de la drogue ». Car l’enquête qui a été menée jusque-là laisse supposer qu’il y a plusieurs chainons manquants, soit au niveau des individus, soient des procédures et des faits.

Les chainons manquants

La première question restée sans réponse, un mois après le démantèlement de ce vaste réseau, concerne 3 individus dont les noms apparaissent dans les déclarations du principal suspect, Sidi Mohamed Ould Haidalla, mais que les services de sécurité n’ont pas arrêtés, malgré que l’une de ces personnes se soit présentée, en tant que simple témoin, et a été libérée. Il s’agit du nommé Hacen Ould Htati, ressortissant de l’Azawad, dont le rôle est jugé essentiel, par les enquêteurs, dans cette histoire de trafic de drogue, mais qui a réussi à s’échapper, selon la police mauritanienne. Malgré un mandat d’arrêt international lancé contre lui, son nom n’est pas apparu dans le rapport des enquêteurs. Plus étrange encore, le fait que le principal accusé dans le dossier n°101, Sidi Mohamed Ould Haidalla, n’ait pas été interrogé à propos de ce personnage dont le rôle parait pourtant central. Autre indice qui aurait pu mettre la puce à l’oreille des enquêteurs : la relation entre les deux hommes remonte à 2007 dans l’autre dossier dit de « l’avion de la drogue ». Pour certains observateurs, cette faille dénote du peu de sérieux de l’enquête menée par les services de sécurités mauritaniens.

La deuxième personne qui suscite des interrogations est un certain Hacen Ould Boubacar, présenté comme celui qui a engagé l’équipe chargée de l’opération. Son frère Hamdi Ould Boubacar devait superviser  l’acheminement de la drogue par voie de mer depuis Lougueira.  Hacen se trouverait actuellement en Espagne et le fait qu’il n’ait pas été arrêté, vue la solidité de la coopération sécuritaire entre la Mauritanie et ce pays, est une autre preuve que l’enquête manque de sérieux.

La troisième personne est un certain Nagim Ould Abdalla Al Jekeni qui a reçu de Bouh Ould Mohamed Lemine, gérant d’un bureau de change, la somme de 27.700.000 UM (73.000 euros) à remettre à Sidi Mohamed Ould Haidalla. Le gérant a été arrêté et inculpé dans cette affaire alors que l’intermédiaire, l’homme qui a retiré l’argent, a seulement été entendu comme témoin et libéré peu après. Par la suite, les autorités réclameront l’arrestation d’Ould Abdalla Al Jekani, comme personne impliquée dans cette affaire de drogue, mais il se trouve qu’il s’est évaporé dans la nature.

A qui appartient l’embarcation ?

Les enquêteurs mauritaniens n’ont pas cherché à savoir à qui appartient l’embarcation qui a transporté la drogue de Lagouira. Autre aspect resté sans intérêt pour les enquêteurs : de qui l’encombrante « marchandise » a été réceptionnée côté marocain, et non loin de la ville de Nouadhibou ? Aucune question aussi pour savoir si toute la drogue a été transbordée dans l’embarcation mauritanienne ou s’il en restait encore dans le bateau attendant, peut-être, l’opportunité de faire entrer une autre livraison sur le territoire mauritanien.

Toutes les questions ont tourné autour du rôle des individus arrêtés sans chercher à savoir si le réseau démantelé avait des ramifications transfrontalières ou non.

Les sources de financements

Comme l’enquête s’est arrêtée aux frontières nord de la Mauritanie et n’a même pas atteint la localité de Lagouiera où se trouve pourtant une unité de l’armée mauritanienne, elle s’est arrêtée également aux frontières est du pays sans chercher à savoir la provenance des 50 millions de FCFA parvenus à Sidi Mohamed Ould Haidalla du Mali par le biais du bureau de change de Bouh Ould Mohamed Lemine au Grand Marché de la Capitale. Aucune question sur l’expéditeur de ce montant pour connaître son identité et savoir s’il a effectué de tels transferts dans le passé.

Un oublié volontaire

Quand le principal suspect, Sidi Mohamed Ould Haidalla parle de « complot » contre sa personne organisé par divers milieu, et déclare ne connaître de ce réseau que son frère Ely Cheikh ou son proche Moudi Ould Slama, les enquêteurs se devaient de pousser les investigations plus loin pour voir clair dans cette affaire. Surtout qu’Ould Haidalla a cité trois individus qu’il soupçonne être derrière son implication dans cette nouvelle affaire de drogue. Pourtant personne ne lui a demandé de donner plus de détails sur ce qu’il avance, surtout que parmi les individus cités figurent trois ressortissants de l’Azawad : Al Barbouchi, Omar Ould Ahmed et Abdallahi Kaikouss.

Qui a informé Ould Haidalla ?

Maaloum Ould Ahmed Bellal a déclaré aux enquêteurs que Sidi Mohamed Ould Haidalla l’a contacté samedi matin, le 30/01/2016, pour l’informer de la présence sur la route Nouakchott-Nouadhibou de patrouilles à la recherche de salafistes et lui demander de stopper l’opération consistant d’acheminer la « marchandise » vers le puits de Boughabra, comme convenu auparavant.  Ould Ahmed Bellal a ainsi changé de direction, suite à l’appel d’Ould Haidalla, prenant la direction de Tijirit (120 km au nord de Nouakchott), où il recevra un coup de fil du commandant de la zone nord de la gendarmerie, Dey Ould Yezid, avant l’arrestation de tous les membres de la bande. La question posée est : qui a averti Ould Haidalla et pourquoi les enquêteurs ne cherchent pas à le savoir ?

Quel rapport avec 2007 ?

Cette nouvelle affaire de drogue est-elle liée à celle de 2007 dite affaire de « l’avion de la drogue » ? Le ministre de la Justice, Me Brahim Ould Daddah, a déclaré, lors d’une conférence de presse sur ce dossier, que l’une des personnes arrêtées (sans citer de nom) est poursuivie jusqu’à présent dans l’affaire de 2007, précisant que cet homme a bénéficié d’une liberté provisoire contre laquelle le parquet avait interjeté en appel et que le dossier est pendant, en ce moment, devant les tribunaux.

Le dossier de « l’avion de la drogue », en 2007, est l’une des plus célèbres affaires de trafic de cocaïne dans le pays. Les autorités avaient saisi à l’époque un avion transportant 750 kg de cocaïne et des voitures. Seulement, les personnes arrêtées ont été libérées sans jugement ! Seul Sidi Mohamed Oud Haidalla avait été arrêté au Maroc et avait purgé une bonne partie de la peine de sept ans de prison ferme à laquelle il a été condamné.

De l’argent pour le gouvernement

Le ministre de la Justice mauritanien a indiqué que le gouvernement a approuvé un décret qui autorise les autorités à vendre les biens saisis dans ce genre d’affaire et à répartir l’argent récolté comme suit : 50% pour l’Etat, 25%  pour l’équipe qui a procédé à l’arrestation des trafiquants et 25% pour l’ensemble des services qui luttent contre le trafic de drogue.

Les biens saisis dans cette affaire son : une Toyota V8 dans laquelle se trouvait Sidi Mohamed Ould Haidalla et trois autres tout-terrain avec Moudi Ould Slama, Maaloum Ould Ahmed Bellal et Ely Cheikh Ould Haidalla. A cela s’ajoute la saisie de 2.350.000 UM (6200 euros) et la montre d’une grande valeur de Sidi Mohamed Ould Haidalla (entre 10000 et 47000 USD).

La quantité de drogue saisie est estimée à 1,3 tonne répartie dans sacs de 12 et 25 kilogrammes chacun. Elle a été trouvée dans les véhicules conduits par Maaloum Ould Ahmed Bellal (24 sacs) et Ely Cheikh Ould Haidalla (57 sacs).

Composition du réseau

Le réseau était composé de quatre groupes, dont un servait d’appui (fausses plaques d’immatriculation pour les véhicules et change), selon les conclusions des services de sécurité mauritaniens. La première équipe, dirigée par Sidi Mohamed Ould Haidalla, coordonnait toute l’opération. Elle comprenait Hacen Ould Htati, qui a réussi à s’enfuir vers le Mali, et Hacen Ould Aboubakr, résidant en Espagne. Alors qu’Ould Haidalla a été arrêté, les deux autres sont sous le coup d’un mandat d’arrêt international.

La deuxième équipe avait pour mission de transporter la drogue d’un bateau marocain près de Lagouira vers la zone d’Amhaijrat (120 km au nord de Nouakchott). Le groupe était dirigé par Hamdi Ould Aboubakr, sur demande de son frère Hacen Ould Aboubakr qui se trouve en Espagne. Les autres membres de cette seconde équipe étaient Saleck Ould Bellal, les deux capitaines de bateau Hamadi Boubou Sall et Mohamed Moctar Ould Ahmed, ainsi que deux hommes de main répondant aux noms de Ousmane Diop et Moustapha Sall.

Enfin, le troisième groupe avait pour rôle d’acheminer la drogue, transportée dans une embarcation de Legoueeira à Mhaijrat, sur terre et plus précisément au puits de Boughabra. Cette équipe était composée d’Ely Cheikh Ould Haidalla, Maaloum Ould Ahmed Bella, son frère Mohamed Ould Ahmed Bellal et leur neveu Baba Ould Ely.

L’équipe qui assurait la logistique dans cette opération était composée du propriétaire du bureau de change, Bouh Ould Mohamed Lemine, qui avait remis 27 millions d’ouguiyas à Nagim Ould Abdalla en fuite au Mali, et Ahmed Ould Abdel Kader accusé d’avoir fourni une fausse plaque d’immatriculation SG (services du gouvernement) à la Toyota Land Cruiser d’Ely Cheikh Ould Haidalla.

Une opération complexe

L’opération qui a conduit au démantèlement de ce réseau de trafiquants a vu la participation de la police, de la gendarmerie et de l’armée et a duré trois jours (du 29 au 31 janvier 2016).

Sidi Mohamed Ould Haidalla, le cerveau présumé de la bande, a été arrêté à son domicile de Nouakchott par la police. Le groupe de l’embarcation et une des voitures ont été appréhendés par la gendarmerie tandis que le reste du groupe chargé du transport de la drogue, dont Ely Cheikh Ould Haidalla, a été arrêté par une unité de l’armée à 20 km sur la route Nouakchott-Akjoujt.

 

Source : https://alakhbar.info/intrep/reports/14325-101.html

 

Traduit de l’arabe par SNEIBA Mohamed

 

 

 


Quand manger devient impossible, la révolution devient possible

Une marche de l'opposition
Une marche de l’opposition

Avouons-le, le meeting du Rassemblement des forces démocratiques (RFD) d’hier était une réussite. Je dirai un grand succès même. Parce que beaucoup prédisaient le contraire. D’autres sont même allés jusqu’à décréter la mort du parti d’Ahmed Ould Daddah.
Le départ de la « famille » Moine n’a finalement eu aucune incidence négative sur la capacité de mobilisation du RFD. On peut même dire qu’il a, en quelque sorte, pousser les « fainéants » à plus d’entrain puisqu’il y avait foule macha Allah. Deux choses expliquent, à mon avis, ce succès.
Il y a d’abord la personnalité d’Ahmed Ould Daddah. Un opposant qui a fait, jusque-là, un parcours sans faute, si l’on oublie, l’erreur (d’appréciation) du coup d’Etat d’août 2008 contre le président « démocratiquement élu » Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi. A part le soutien de quelques mois à la « Rectification », le président du RFD a fait preuve d’une constance exemplaire, dans les principes, et démontré que son combat pour une Mauritanie démocratique s’inscrit dans la durée. Qu’importe si lui ne peut pas accéder à la présidence ou que son parti ne puisse bénéficier de financements parce qu’il a décidé de ne pas prendre part des élections truquées.
Sur un plan plus personnel, Ahmed Ould Daddah est, comme le disait la diva Maalouma, « l’ami du peuple ». Je me rappelle de ce jour de l’année 92 quand, de passage à Aleg, il m’avait reçu au domicile du coordinateur local de l’Ufd, Moustapha Ould Abdel Vettah, et a échangé avec moi sur mes écrits contre le pouvoir de l’époque. L’image que j’ai retenue de l’homme depuis ce jour est restée intacte, même si, en 2005, je m’étais désengagé de la politique après avoir constaté le jeu trouble de certains chefs de l’opposition.
Il y a aussi, dans l’explication du succès du meeting du RFD (et avant lui, celui du FNDU) que le peuple « y en a marre ». La situation actuelle est intenable. Sur tous les plans. Et j’ai toujours dit (et écrit) que le pouvoir a plus à craindre d’un peuple poussé dans ses derniers retranchements que d’une opposition divisée. Quand manger devient impossible, tout devient possible.


Mauritanie : l’opposition embarquée, non engagée

Une marche de l'opposition
Une marche de l’opposition

La crise, la crise, la crise. Je sais que je me répète ou, pire, je parle d’une vérité que tout le monde connait. La Mauritanie se fourvoie. Le pouvoir le sait. Sa « majorité » (mot impropre puisqu’elle était celle du pouvoir précédent et sera celle de celui qui succédera à l’actuel) dit le contraire. Elle est dans son rôle de « soutien indéfectible » du pouvoir. Elle applaudit ses « bonnes » actions mais ne voient pas ses erreurs. Le rejet par leConseil constitutionnel de la loi organique préconisant le renouvellement du sénat en est la preuve : le « parle-et-ment » constitué majoritairement d’élus du camp présidentiel n’a pas posé de questions et s’était empressé de faire passer cette loi comme une lettre à la poste. Il est aujourd’hui en plein dans le ridicule qui ne tue plus.

Face à tous ces errements politiques, à la crise économique et sociale qui inquiètent de plus en plus des citoyens qui ne savent plus à quels saints se vouer, l’opposition nage, elle aussi, en plein désarroi. Elle attend un dialogue qui ne vient pas. Elle se concerte, s’associe et se dissocie. Elle n’est pas maitresse de son destin. Elle est embarquée, et non engagée, comme dirait Sartre.

Le retour à la rue n’est qu’une manière de remettre à plus tard une mort politique certaine d’hommes et de femmes qui appartiennent à un autre âge. Car l’erreur de cette opposition est de croire que les mêmes causes produisent les mêmes effets. C’est peut-être vrai dans les sciences exactes mais nullement en politique qui est – seulement – l’art du possible. Des possibles.

Il était possible, en juillet 2008, de ne pas accepter l’Accord de Dakar. L’opposition de l’époque devrait savoir que le général Aziz, qui a « risqué sa vie » à deux reprises, n’est pas homme à s’engager dans une bataille électorale susceptible d’être perdue. Si la Coordination de l’opposition démocratique (COD) avait appréhendé ce fait, elle n’aurait pas accepté d’être embarquée dans la présidentielle de juillet 2009 qu’elle a perdue de la manière que l’on sait.

Il était possible, pour cette même COD de s’engager dans le dialogue de 2011 puisqu’elle n’avait plus rien à perdre. Aziz avait réussi à légaliser un pouvoir qu’il avait déjà légitimé par ses soutiens traditionnels (parlement, partis politiques, chefs de tribus, hommes d’affaires et chefs religieux). L’opposition se devait seulement de limiter les dégâts en sortant du dialogue avec des résultats garantissant l’alternance démocratique à l’issue des deux mandats prévus par la Constitution. Il ne fallait pas laisser passer cette chance, saisie seulement par la CAP (Coalition pour une Alternance Pacifique) pour réclamer aujourd’hui un dialogue à plusieurs inconnues. Quatre années perdues donc pour une COD devenue entre-temps FNDU (Forum national pour l   a démocratie et l’unité). Un temps fou qui a permis au président Aziz de « cuirasser » encore plus son régime et de penser, sérieusement, à un troisième mandat.

Au niveau intérieur, les seules forces qui comptent (l’armée et la rue) restent impassibles aux tiraillements politiques entre une majorité calfeutrée dans sa tour d’ivoire et une opposition impuissante.

Certes, la crise économique et le malaise social sont perceptibles mais comme le disent souvent les thuriféraires du régime, « la Mauritanie n’est ni la Tunisie ni le Burkina ». Une manière de dire, sous le ton du sarcasme, que le pays n’est pas encore prêt pour un « printemps arabe » ou un harmattan africain.

L’armée aussi semble soudée derrière son chef suprême qui lui renvoie bien l’ascenseur. De nouveaux généraux viennent remplacer ceux qui ont été envoyés à la retraite, mais dont certains pourraient être « retraités » au niveau de certaines fédérations patronales. Deux signes qui ne trompent pas et qu’il faut interpréter comme la volonté d’Aziz (non encore affichée) de prolonger son séjour au Palais Ocre.

Une éventualité qui ne ferait pas remuer une communauté internationale qui assiste, impuissante elle aussi, à des scénarios identiques de « troisième mandat », ou plus, au Congo, au Burundi, au Rwanda, en Guinée équatoriale, en RDC et au Tchad. Dans un tel contexte, Aziz, ne sera pas « le petit mur ». Il peut se dire, « ils l’ont fait sans conséquences, alors pourquoi pas moi » ? Et, pour une fois, il aura raison.


Sénat : mon avis de profane contre celui du Conseil constitutionnel

Mauritanie: conseil des ministres (photo : AMI)
Mauritanie: conseil des ministres (photo : AMI)

Le Conseil constitutionnel vient de dire que la loi organique prise par le gouvernement mauritanien concernant le renouvellement du sénat est nulle et non avenue ! Une loi applaudie pourtant (approuvée largement) par ce même sénat après l’avoir été par l’assemblée nationale !
Cette décision « historique », comme s’empressent de la qualifier des médias en manque de sensationnel, est pour moi un non événement ! Elle change quoi en fait ? Rien !
L’actuel sénat qui a derrière lui onze ans d’existence, pourra continuer à jouer les prolongations. Certains juristes maison trouvent même des voies contournées pour nous dire que le gouvernement, seul habilité à fixer la date de son renouvellement (maintenant total et non partiel) a l’excuse de « l’opportunité » !
L’opportunité ? Celle-là a déjà pris le visage de « l’attente d’un état-civil fiable » ! On avait alors oublié que le collège électoral est constitué de conseillers municipaux connus. Ridicule donc, comme excuse. Puis on avait avancé l’espoir d’un dialogue entre le pouvoir et l’opposition qui permettait à cette dernière de participer ! Là encore, l’argumentaire du gouvernement manque de sérieux. Comment une opposition (je parle du FNDU) qui n’a aucun conseiller municipal peut-elle entrer dans l’arène électorale avec une Union pour la République (UPR) qui détient les 3/4 des mairies ?
Je pense qu’il faut maintenant ajouter à ces deux « opportunités » manquées celle que le Conseil constitutionnel vient d’offrir au gouvernement : continuer à différer le renouvellement du sénat en « toute légalité » sans se soucier de sa légitimité !
Car les « Sages » rejettent une loi fixant une échéance non l’objet de cette loi (le sénat). La décision vient même, paradoxalement, proroger « l’anormalité » de la chambre haute du parlement mauritanien. Elle tire d’affaire un gouvernement qui était bousculé par le temps et n’attendait, en principe, que l’aval du président pour annoncer la tenue du scrutin devant permettre au sénat de revenir aux « normes » démocratiques.
L’avis du conseil constitutionnel est, à mon sens, une façon ingénieuse de voler au secours du gouvernement. Un retour à la case départ, exactement comme on le fait depuis 2009 avec le dialogue.
En rejetant la loi scélérate du gouvernement, le conseil constitutionnel lui donne l’opportunité, réelle celle-là, de revoir sa copie (ça prendra le temps que ça prendra), de reprendre le parcours Assemblée nationale-sénat (pour acclamation) avant d’envisager une date. 2017 ? 2018 ? Un scénario idéal avant la présidentielle de 2019-2020 ! Et pour la perspective d’un troisième mandat pour Aziz.


Remaniement partiel en Mauritanie : pour la première fois, les erreurs se payent cash

Le Premier ministre Yahya Ould Hademine (Photo : elhourriya)
Le Premier ministre Yahya Ould Hademine (Photo : elhourriya)

Un remaniement inattendu mais bienvenu. Avec cinq départs : Ould Meimou (Affaires étrangères), Ould Rayess (Affaires économiques), Ba Ousmane (Éducation nationale), Ould Zein (Habitat) et Ould Jelvoun (Santé).

Les ministres débarqués ont ceci de commun : leurs départements plient sous les scandales À l’éducation nationale, la manifestation d’hier, sévèrement réprimée par les forces de l’ordre, a été la goutte qui a fait déborder le vase. Une équipe scolaire (école Nessiba 1) a raté le tournoi de football organisé par la chaîne de télévision qatari « Jim » parce qu’au ministère des fonctionnaires véreux ont cherché, semble-t-il, à soustraire 33000 dollars à cette television. Le scandale a fait la Une de tous les journaux et sites et le président Aziz ne pouvait fermer les yeux sur cette affaire qui survient quelques mois après la fuite des épreuves du bac. Ba Ousmane est remplacé à ce poste par Isselmou Ould Sid’El Moctar.

Ould Zein qui quitte le ministère de l’Habitat, de l’urbanisme et de l’amenagement du territoire, paie sans doute pour son passage au ministère de la justice mais aussi pour les importants retards enregistrés au niveau de projets en cours. Il est remplacé par Seyidina Ali Ould Sidi Ould Jeylani.

La sortie de Sid’Ahmed Ould Rayess, dont le département des affaires économiques fusionne avec celui des Finances, coïncide avec l’arrivée à Nouakhchott d’une mission du FMI. Et l’on pense qu’après le scandale de la Maurisbank, avec la perte sèche de près de 20 milliards d’ouguiyas, alors qu’Ould Rayess était gouverneur de la Banque centrale de Mauritanie (BCM), une affaire de faux chiffres, comme celle de 2004, n’est pas à exclure. Le départ d’Ould Rayess renforce l’assise de Moctar Ould Diay qui se voit confier les affaires économiques rattachées désormais aux finances. Ould Diay est récompensé sans doute pour avoir initié à la direction des Impôts (et poursuivi en tant que ministre des finances) une croissance record des taxes et impôts. Il sera cependant secondé par ministre délégué en charge du Budget (Mohamed Ould Kembou)

Au ministère de la Santé, Ould Jelvoune cède son fauteuil au professeur Kane Boubacar. Le départ d’Ould Jelvoune était demandé depuis plusieurs mois par la rue qui lui reproche son attitude face à la fièvre du Rift mais surtout de tromper le président Aziz en lui faisant croire que le secteur de la santé n’est plus comme avant.

Enfin, la sortie de Hamada Ould Meimou trouve elle aussi son explication dans le malaise grandissant au sein des Affaires étrangères où les jeunes diplomates ne cessent de dénoncer la présence aux meilleurs postes de fonctionnaires étrangers au département. Ould Meimou qui a passé un peu plus d’un an aux affaires étrangères est remplacé par Isselkou Ould Ahmed Izidbih qui quitte laisse son poste de Président de l’Autorité nationale de Régulation.


Un ministre dit des bêtises ou se tait

Mohamed Lemine Cheikh, ministre mauritanien des relations avec le parlement (photo: cridem)
Mohamed Lemine Cheikh, ministre mauritanien des relations avec le parlement (photo: cridem)

La der des ders en Mauritanie est ce propos tenu, jeudi dernier, par le ministre des relations avec le « parle-et-ment ». Un propos d’une étrangeté telle qu’il a éclipsé toutes les autres actualités nationales : participation du président au sommet de l’UA, nouvelle affaire de drogue, avec l’arrestation d’une trentaine de personnes, dont le fils d’un ancien chef d’Etat, la polémique récurrente sur la place de l’arabe (et du français) dans l’administration.

La dernière bêtise du ministre porte-parole du gouvernement ? Je vous la livre, un peu refroidie certes, mais dans toute sa splendeur de propos vexatoire, d’inculture et de peu de considération pour la personne : « les pauvres ne sont pas affectés par le prix élevé des hydrocarbures…parce qu’ils n’ont pas de voitures et parce qu’ils ont « Emel » !

Emel, une vieille rengaine du pouvoir. Un disque rayé qui ne permet plus d’entendre la voix du lead vocal. « Emel » (espoir, en français) est un programme social lancé par le gouvernement en 2012 pour lutter contre la hausse des prix des denrées de première nécessité. Des centaines de boutiques ouvertes « sur toute l’étendue du territoire national », affirment les responsables gouvernementaux, pour permettre aux pauvres d’avoir le riz, l’huile, le sucre et le lait en poudre à des prix réduits. L’opposition a toujours douté de l’efficacité d’un tel programme qui a pourtant englouti des dizaines de milliards d’ouguiyas.

Emel n’est aujourd’hui qu’un programme maintenu en vie pour des raisons de propagande. Les pauvres commencent à le déserter parce que les produits proposés ne sont pas de qualité. Le riz mauritanien ne tient pas la concurrence avec le riz importé dont le prix est passé, en ce début d’année 2016 du simple au double.

Donc, parce qu’ils ont « Emel », les pauvres de Mauritanie n’ont plus besoin d’autre chose. Ils continueront de se déplacer à dos d’âne ou de chameau. Ils n’ont pas de voitures, avait dit le ministre des relations avec le « parle-et-ment » qui aurait dû ajouter aussi : et les riches n’ont pas de droits, rien que des devoirs. C’est pourquoi ils doivent supporter le manque à gagner engendré par la chute du prix du minerai de fer. Ce que la Société nationale industrielle et minière (SNIM) ne peut plus donner au gouvernement (avec une tonne de fer passée de 150 dollars US à moins de 50 dollars), il faut le « mettre sur le dos » des citoyens qui continuent à acheter le carburant à 484 UM le litre, alors que le baril est aujourd’hui à moins de 40 dollars US. Avec cette arnaque, cet impôt indirect, l’Etat gagne près de 120 milliards d’ouguiyas, estiment des experts ! Et le ministre porte-parole du gouvernement ne pouvait aborder une telle question, à enjeu économique évident, sans proférer la bêtise du siècle. Il dit au pauvre mauritanien : « mange et tais-toi » ! San Antonio (Frédéric Dard) doit se retourner dans sa tombe.