Le discours de la Baule revisité par François II

9 décembre 2014

Le discours de la Baule revisité par François II

François Hollande et ses pairs africains, Dakar 2014 (Photo : google)
François Hollande et ses pairs africains, Dakar 2014 (Photo : google)

La sommation faite le 29 novembre 2014 par François Hollande à ses pairs africains nous ramène un quart de siècle en arrière. Le 20 juin 1990, quand François Mitterrand avait poussé, dans son célèbre discours de la Baule, la quasi-totalité des autocrates africains de l’époque à s’essayer à la démocratie. Je dis bien « s’essayer », car 25 ans plus tard, l’Afrique donne encore l’impression de faire du surplace.

Certes, la plupart de ceux qui étaient là quand « François 1er » avait ordonné : « Démocratisez pour pouvoir continuer à bénéficier de l’assistance de la France » ne sont plus là, mais les systèmes, les « démogachis » qu’ils ont mis en place pour ne pas se soumettre à ce néocolonialisme sans détour n’ont pas consacré la chute du « mur africain » après celle deux ans plutôt du Mur de Berlin. La preuve est sans doute en cette difficulté pour les oppositions africaines de provoquer l’alternance de manière pacifique. A chaque fois, c’est l’armée ou la rue qui balaie un pouvoir qui avait un « habillage » démocratique que les pays occidentaux les plus regardants traitaient pourtant comme des régimes normaux. Ce fut le cas en Mauritanie (en 2005 et 2008), en Guinée (2008), à Madagascar (2009), en Tunisie (2011), au Mali (2012)et récemment au Burkina Faso.

Une telle situation, une telle résistance à aller à la vraie démocratie, me pousse à donner raison à François II, même si on peut considérer que la manière était un peu… gauche. « Ne manipulez pas vos Constitutions pour vous maintenir au pouvoir » n’est certes pas différent de « démocratisez sinon », mais c’est une différence de contextes. François Hollande est un président qui, chaque jour, perd un peu plus le contrôle politique de son pays, atteignant le plus bas taux de popularité selon les sondages. Pourrait-il alors se faire entendre dans une Afrique où le pouvoir rend fou? A tel point qu’après 42 ans de règne sans partage, Kadhafi avait pris les armes pour ne pas « dégager », finissant tout de même comme on sait, et que Blaise Compaoré, après 27 ans de pouvoir s’entête à faire fi de la preuve de défiance qu’un million de Burkinabè lui ont démontrée en sortant dans la rue.

En réalité, la France peut tout et ne peut rien. Elle peut cesser de s’adapter aux situations, bonnes ou mauvaises pour elle, pour faire comprendre à nos dirigeants que rester au pouvoir est une affaire de mérite. Que la stabilité de leurs systèmes est inhérente non pas à la perception de la France mais à la manière dont ils gouvernent. Elle ne peut rien contre la folie des hommes, la passion satanique du pouvoir qui habite chaque dirigeant africain une fois arrivé au sommet de l’Etat. Elle ne peut rien contre la corruption des élites de ces pays qui s’accommodent de tous pouvoirs et entretiennent les peuples dans leurs illusions de démocratie, de liberté, de justice et de développement.

 

 

 

Partagez