Autour d’un thé : Chronique de mon frère

22 juin 2013

Autour d’un thé : Chronique de mon frère

Crédit photo: Cridem.org
Crédit photo: Cridem.org

Une vieille histoire typiquement de chez nous rapporte qu’un homme bien sage est rentré dans sa zériba (enclos) pour traire ses chèvres. A la surprise générale, l’homme commença par « traire » un bouc.

C’était, expliquera-t-il aux surpris, une façon de démontrer aux chèvres qu’elles seraient inévitablement traitées. Le limogeage intempestif du wali du Tiris Zemour et sa dégradation de son grade de général m’ont rappelé cette parabole.

Les rumeurs persistantes sur l’imminent limogeage du gars de la SNIM remplissent les airs, les rues et les salons. Il serait l’ami du Premier Ministre. L’Administrateur Directeur Général de la SNIM est un fidèle « ami » du Président. Ould Baya, le gouverneur limogé, était tout cela à la fois, en plus d’être un frère d’armes et un collègue putschiste.

Aucunement prémuni contre les LIPMHP (Limogeage Intempestif Pour Mauvaise Humeur Présidentielle) contre lequel le seul vaccin semble être, d’après les praticiens traditionnels de la cour : consommer 50 renseignements par semaine + proférer 5 à 4 insultes/jour à l’opposition et faire 6 séances de massage, 2 jours sur 7, à VIP d’un certain entourage, quelque part vers la direction de la Boutique Centrale de Mauritanie (BCM). Attention ! Abus nuisible, mettre hors de portée des enfants, conserver à moins de 25°C et bien refermer la boîte après usage. Limogeage, disgrâce, relever ou virer.

C’est quoi ? C’est rien. Juste se mettre un peu à l’ombre et manger tranquillement ce que tu as amassé. Le temps de le finir et te revoilà, au choix, délimogé, dédisgracié, dérelevé ou déviré, tous synonymes de réhabilité. Ne soyons pas de courte mémoire. 2005. Coup d’Etat contre le système de Taya. Vingt-et-un an de mal-gouvernance et de laisser-aller total. Des hommes totalement nouveaux sortis de leur paquet.

Un comité militaire dont les patrons viennent directement de la planète Mars. Une aile civile dont les composants viennent de Neptune. Vingt ans de renseignements. C’est rien. Quinze ans de BASEP ? Soyons sérieux. Ce n’était pas à eux que revenait la décision. Passe. 2007. Election présidentielle. Le Président élu et son challenger. Des hommes de l’Indépendance. Leurs collaborateurs aussi.

Les moins jeunes sont de 1978 à 1981, 1984. Pas grave. Mais voilà Août 2008. Les fossiles sont revenus. Les dinosaures réapparaissent. Pour sauver le pays, un homme « nouveau », arme en bandoulière et galons sur les épaules, chasse ces gâteux qui ont tout gâté. Faute du Président élu en mars 2007 d’avoir ramené les symboles de la gabegie. Le défi : regardez, aujourd’hui, les démembrements de l’Etat.

C’est facile de parler. Raconter des histoires dans les conférences de presse et les meetings populaires. A part deux ou trois vieilles « gloires nationales » dont on ne peut se passer de l’expérience, aucun autre ancien n’a été retenu. Et puis, après le limogeage, il n’y a plus que la promotion.

Toute chose finit, quand elle atteint la limite. Le monde est fait de tout : de justes et de faux. D’hommes et de femmes. De promus et de limogés. D’opposition et de majorité. D’émoussements et de dèches. De civils et de militaires. De dictature et de démocratie. Non, vraiment de tout.

D’ange, de Satan, de grand, de petit… En prime, la bonne proposition d’un ami, ayant appris que deux députés ont failli en venir aux poings : construire un petit ring, juste devant la porte principale de l’Assemblée. Comme ça, si deux honorables veulent se mesurer les biceps, hop ! Et ils sont sur le tapis. Bien entendu, recrutement d’arbitres et aménagement d’une petite tribune pour les supporters.

En attendant, les sessions parlementaires pourraient fort bien se dérouler dans une grande cour à côté du terminus des bus d’El Mina. Et, à chaque fois que les députés auront besoin de se terrasser, l’arène est juste à quelques mètres, à gauche, en allant vers la plage. Ya plus que ça.

Depuis novembre 2011 que les parlementaires mangent indûment l’argent public, en contrepartie de comportements vraiment regrettables pour des représentants d’un peuple qui ne sait plus quoi faire : balle dans l’intestin présidentiel, coups de poing entre députés et insultes, copieuses, entre leaders et élite. Où va-t-on ? Je ne sais pas mais on y va…

Sneiba El Kory (Le Calame)

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