Nord Mali : Ce sera une guerre « totale »

Article : Nord Mali : Ce sera une guerre « totale »
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11 décembre 2012

Nord Mali : Ce sera une guerre « totale »

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La Mauritanie a vraiment tous les soucis à se faire. On peut même dire, sans risque de se tromper, que la menace qui pèse sur la stabilité et la sécurité du pays, venant de l’évolution possible de la crise malienne en guerre contre le terrorisme, est plus grande que la tension interne née du coup d’Etat du 6 août 2008 et de l’élection présidentielle de juillet 2009 que d’aucuns voient comme son prolongement naturel.

En fait, il est impensable que l’intervention militaire que projettent les forces de la Communauté économique des états de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), avec l’appui des puissances occidentales, se fasse uniquement dans la zone occupée, depuis plusieurs mois, par les groupes islamistes armés (AQMI, MUJAO, Ançar Edine). Comme l’ont souvent dit et répété les chefs de guerre de ces organisations terroristes, la guerre sera « totale ». On peut imaginer que des pays de la zone CEDEAO s’empressent à vouloir déclencher l’offensive mais les voisins immédiats du Mali (Mauritanie, Algérie, Burkina, Sénégal, Guinée, Niger) sont, au propre comme au figuré, dans la tourmente que connait Bamako, depuis le coup d’Etat du 22 mars 2012 ayant conduit à la chute du président Amadou Toumani Touré et précipité celle de tout le nord Mali entre les mains des groupes islamistes armés.

Ce sera pratiquement le même scénario de causes à effets, si la volonté du capitaine Sanogo, président du Comité militaire de suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité (CMSRFDS), de déclencher l’offensive contre les islamistes, à l’arrivée à Bamako des armes bloquées depuis plusieurs mois au port de Conakry. On peut penser qu’il ne s’agit pas tout simplement d’un effet d’annonce parce que d’autres faits poussent à croire que la guerre est imminente : La Mauritanie qui vient d’acquérir un avion brésilien Embraer destiné à des attaques au sol, et qui s’attend à d’autres livraisons, et l’ambassadeur de France à Bamako, Christian Rouyer, qui vient de lancer un appel à l’Algérie et à la Mauritanie pour prendre davantage une position en faveur de la guerre. Un appel qui fait suite à un constat peu « engageant » pour « l’armée malienne et la communauté internationale (qui) ne sont pas prêts pour une intervention au nord Mali », aux mains de groupes islamistes armés depuis plusieurs mois, selon le diplomate français. Ce dernier exprimait, sans nul doute, une position officielle, puisqu’il s’exprimait, samedi dernier, dans une rencontre sur « la politique française au Sahel : cas du Mali ». On peut  penser que dès que l’armée malienne sera en possession de ces armes, bloquées dans un premier temps par la CEDEAO pour ne pas tomber dans les mains de la junte, le compte  rebours pourra commencer.  Mais ce ne sera sans doute pas suffisant pour bouter hors du pays les terroristes d’Al Qaeda au Maghreb Islamistes (AQMI), les salafistes d’Ançar Edine, les narcotrafiquants du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest (MUJAO) et les indépendantistes du MNLA. L’offensive va recréer une sorte de « sainte alliance » entre tous ces mouvements et le soutien « logistique » de la France et des USA aux 3300  soldats de la CEDEAO appelés à épauler l’armée malienne pour reconquérir l’Azawad ne sera pas de trop. Car ce n’est pas seulement la fougue retrouvée de l’auteur du putsch du 22 mars contre Amadou Toumani Touré qui a précisé que «l’armée n’attendra pas septembre 2013 pour libérer le Nord » comme l’avait dit Romano Prodi, envoyé spécial de l’Organisation des Nations unies (ONU) au Sahel au cours d’une conférence de presse, le mardi 20 novembre à Rabat (Maroc), qui peut venir à bout des combattants des groupes islamistes armés. On craint, en Mauritanie, que le tonitruant capitaine n’ouvre seulement la boîte de Pandore avec toutes les conséquences que le déclenchement de la guerre aura sur la Mauritanie. Même si, à l’inverse, le pourrissement de la situation au nord Mali inquiète.

Du côté de Nouakchott, le changement de la donne malienne est perceptible à travers cette soudaine prudence, cette retenue, dans l’action et dans le verbe, dont font preuve les responsables mauritaniens, le président Aziz en tête. Le président n’a-t-il pas dit, lors de son entrevue avec la presse, le lendemain de la commémoration du 28 novembre, qu’une action militaire au nord Mali n’est pas envisageable ? Sauf si la sécurité du pays est menacée. Ce qui fait dire à certains que Nouakchott a, peut être, passé une sorte de deal avec les groupes islamistes armés, qui aurait été priés de se tenir éloignés des frontières de la Mauritanie. Et pour une fois, le pouvoir mauritanien donne l’impression d’agir en fonction de la raison non des sentiments qui le poussent à passer, aux yeux des mauritaniens, pour une « puissance » militaire sous régionale, capable de dicter sa loi aux voisins.

 

 

 

 

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