L’alternance politique au pouvoir : Conditions ou résultats ?

31 janvier 2019

L’alternance politique au pouvoir : Conditions ou résultats ?

Par Yarba Ould SGHAIR, Secrétaire Exécutif de l’UPR

 

Yarba SGHAIR, Secrétaire exécutif de l’UPR

L’alternance politique peut se définir, en théorie, comme la possibilité pour des partis ou des courants politiques, différents, de se succéder au pouvoir, par le biais d’élections libres et transparentes. Il peut s’agir d’un renversement du rapport de force entre les protagonistes politiques à l’issue duquel l’opposition devient majoritaire et la majorité passe à l’opposition.

C’est ce qu’on peut appeler un cas d’alternance absolue.

Il peut s’agir, aussi, d’un changement qui ne produit pas un tel renversement, mais qui, au contraire, maintient la majorité au pouvoir.

C’est ce qu’on peut appeler un cas d’alternance relative.

On semble quelquefois faire la confusion, voir l’amalgame,  en prenant la première possibilité théorique pour une exigence pratique sans laquelle la démocratie serait biaisée et en faisant semblant d’oublier que les régimes démocratiques sont tenus de créer les conditions objectives et réelles de l’alternance, mais pas d’imposer cette alternance quand les forces politiques en place ne sont pas en mesure de l’opérer dans les faits.

Il y a, certes, ceux qui disent que l’alternance est une condition nécessaire à la démocratie. Mais la logique veut que ce soit juste l’inverse : c’est la démocratie qui est nécessaire à l’alternance.

Quand les citoyens sont libres de choisir leurs représentants, rien ne les oblige à les changer à chaque occasion. La démocratie se mesure à l’aune de la liberté et non à celle du changement.

Les exemples ne manquent pas dans les pays à vieille tradition démocratique et semblent même refléter, ces dernières décennies, un certain niveau de maturité et une certaine volonté de stabilité.

Les Français portèrent François Mitterrand à la présidence de la République en 1981. Ils le reconduisirent en 1988. Le parti socialiste dirigea la France durant 14 ans.

Jacques Chirac lui succéda et la droite qu’il incarne passa 12 ans à la tête de l’Etat.

Aux Etats-Unis, Franklin Roosevelt a été élu président quatre fois entre 1933 et 1945.

Ronald Reagan fut porté à la magistrature suprême par les citoyens américains en 1981 et réélu pour diriger cette superpuissance mondiale jusqu’en 1989.

Georges W. Bush lui succéda et permit ainsi le maintien duParti républicain au pouvoir trois mandats successifs.

Ce qui est nécessaire, c’est d’instaurer les conditions favorables à l’alternance à travers l’existence du pluralisme politique et le respect du multipartisme qui en est l’expression la plus célèbre ; d’organiser des élections libres et transparentes ; de respecter les institutions de l’Etat qu’il convient de maintenir, car l’alternance démocratique ne vise pas à changer la nature de l’Etat ou de ses institutions, mais plutôt à faire « alterner » les dirigeants pour répondre à la volonté du peuple et faire bénéficier l’Etat de visions et de programmes différents.

Voilà les conditions de l’alternance politique. Elles ne sont pas à confondre avec les résultats des élections, qui traduisent généralement le rapport de force et le choix desélecteurs.

En Mauritanie, ces conditions sont plus que jamais réuniesaujourd’hui. La participation aux dernières élections législatives, régionales et municipaleset l’engouement de la centaine de partis politiques que compte le pays reflètent le degré de liberté et de démocratisation de la vie politique.

A l’issue du scrutin du 1er et du 15 septembre dernier, les électeurs mauritaniens ont exprimé leur volonté à travers le suffrage universel. Une majorité s’est dégagée à l’Assemblée nationale, aux Conseils régionaux et aux Conseils municipaux.

Le parti au pouvoir, l’Union Pour la République (UPR) est sorti vainqueur de ces élections grâce, en particulier, au soutien de son Président Fondateur, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz.

Les qualités de l’homme, le charisme et le bilan largement positif du Chef de l’Etat auront convaincu les électeurs de choisir les candidats de cette formation politique qui a accompagné, soutenu et vulgarisé le programme politique du Président de la République décliné en actions et mis en œuvre par le Gouvernement.

La présidentielle de juin prochain confirmera cette tendance et en constituera le couronnement. Tout porte à croire que le candidat de la majorité, Monsieur Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed (Ghazouani) sortira vainqueur du scrutin.Les valeurs incarnées par son choix par le Président Mohamed Ould Abdel Aziz sont à elles seules suffisantes pour mobiliser les électeurs mauritaniens, plus sensibles aux valeurs qu’aux discours et très attachés à la préservation de leurs acquis en matière de sécurité et de stabilité, de démocratie et de développement, d’unité nationale et de cohésion sociale.

Monsieur Ghazouani élu à la magistrature suprême, l’alternance aura été rendue possible. Mais la souveraineté populaire aura maintenu la majorité pour des raisons objectives.

Ceux qui appellent au changement doivent respecter la volonté du peuple et comprendre cette réalité démocratique : l’alternance est un choix, pas une obligation.

 

Partagez