Mandats : un, deux….trois, j’y suis, j’y reste !

15 mai 2015

Mandats : un, deux….trois, j’y suis, j’y reste !

Le président Nkurunziza du Burundi (Photo google)
Le président Nkurunziza du Burundi (Photo google)

A l’heure où j’écris ces lignes, je ne sais pas comment les choses vont finir au Burundi. Mais une certitude s’impose à nous : le président Pierre Nkurunziza continuera à régner dans l’inconfort total, au milieu des manifestations de rue et dans la peur d’une fin dramatique.

Il y a comme une malédiction du troisième mandat. Les peuples africains commencent à exiger le respect des règles du jeu démocratique. Ils n’acceptent plus de se soumettre à cette folle volonté de rester, dont font preuve certains de leurs dirigeants.

Ce refus d’accepter le jeu de poker menteur a commencé au Sénégal en 2011. Le président Wade avait réussi, en 2011, à tripoter la Constitution pour prolonger son règne, après avoir échoué à faire de son fils Karim son dauphin désigné. Peu enclins à recourir à la force, les Sénégalais ont tout de même réussi à « dégager » Gorgui (1) par la voie des urnes. Avec seulement 35% des voix, Wade a fini par comprendre qu’on ne peut pas forcer son destin à tous les coups. Après les épisodes Ben Ali et Moubarak, c’était son tour de dire : « je vous ai compris ». Avec quand même cette particularité africaine : le seul opposant à tous les présidents qui ont gouverné son pays (Senghor et Diouf, avant lui, Macky Sall, son tombeur).

La leçon sénégalaise n’a pas servi à ouvrir les yeux à Blaise Compaoré. Lui aussi, après 27 ans passés au pouvoir, a voulu pousser encore plus loin sa gestion des affaires. Il pensait sans doute que les Burkinabés étaient moins déterminés que les Sénégalais, les Tunisiens et autres Égyptiens à dire « non » à la dictature.

Pierre Nkurunziza est-il tombé dans le même piège, la même erreur ? S’il ne part pas aujourd’hui, il partira demain dans des conditions encore plus dramatiques pour lui et pour son pays.

Il fait partie de ces présidents africains qui n’ont pas encore compris que les temps ont changé. On prête au président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz l’intention de vouloir rester au-delà de 2019. C’est à dire, plus de 14 ans au pouvoir!  Eh oui, lui au moins, il a eu l’intelligence de placer son mandat « bonus » au début. D’abord, il y a cette cogérance du pouvoir avec le colonel Ely Ould Mohamed Vall, d’août 2005 à mars 2007, puis une présidence derrière les coulisses de Sidioca (2), jusqu’au 6 août 2008, où il refuse d’être limogé et décide de passer devant. Mais l’inspirateur des coups d’États des capitaines bouffons, comme Dadis Camara en Guinée et Sanogo au Mali, selon leurs propres aveux, déclare à qui veut l’entendre qu’il respectera le serment prêté, en août 2014, de ne pas toucher à la Constitution. Et ce, malgré les manœuvres montrant le contraire et les appels lancés par des inconditionnels du président le suppliant de rester.

En tout cas, ceux qui disent que la Mauritanie n’est ni la Tunisie ni le Burkina doivent tirer la leçon de ce qui se passe au Burundi. L’Afrique est en marche. Le refus du troisième mandat, le mandat de trop, est entré de plain-pied dans les mœurs du continent. Il peut échouer au Togo ou au Gabon mais ce ne sera que partie remise. «Être ou ne pas être», tel est le nouveau crédo des peuples africains.

1. « Gorgui », le surnom de Wade, signifie, en Wolof, l’homme.

2. Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi

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