Moha le fou, Moha le sage*

Article : Moha le fou, Moha le sage*
Crédit:
4 janvier 2013

Moha le fou, Moha le sage*

Photo : Google
Photo : Google

Nous sommes tous des Moha. C’est à dire des personnes ambiguës sages et folles à la fois, honnêtes, malhonnêtes, bonnes et mauvaises. En politique surtout. Et c’est ce qui explique aujourd’hui l’ambivalence des jugements que l’on porte sur le pouvoir et l’opposition, sur les hommes et femmes qui font et défont les gouvernements et les régimes depuis l’indépendance à nos jours.

De l’intello au planton, nos pensées sur tout et rien sont équivoques. Elles répondent à un besoin d’adaptation – et d’adoption – qui ne tient compte que des intérêts du moment. Ce n’est pas sans raison que l’opposition, dans sa diversité, choisit les rapports qu’elle veut entretenir, en son sein et avec le pouvoir, en fonction de ce qui sert sa stratégie de lutte contre le président Mohamed Ould Abdel Aziz et ses soutiens. C’est également en fonction d’un rapport de force fluctuant, et solidement influencé par les mouvements de protestation au sein de la classe ouvrière et estudiantine, que le Raïs souffle le chaud et le froid. Oui, pour le dialogue, non pour une certaine forme de « cohabitation » ! Les élections auront lieu au moment prévu, puis, il y a quelques petits réglages à effectuer avant de les organiser !

Ces tergiversations « présidentielles » relèvent de la politique politicienne qui alimente depuis toujours les controverses entre la Majorité et l’Opposition. Tout ce qui est dit ou fait par le gouvernement et par les partis de la Majorité, l’Union pour la République (UPR) en tête, relève de l’ambivalence du discours d’un Raïs qui montre, chaque jour, qu’il a bien assimilé la leçon à tirer des pouvoirs précédents. Un mélange de style « Taya », de recettes servies pendant la Transition militaire 2005 – 2007 et de « coups » assénés à l’opposition durant la période de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi et la « Rectification » du 6 août 2008.

Il faut bien que cesse, une fois pour toutes, cette propension typiquement mauritanienne à jouer sur plus d’une corde. Etre soutien du président ou opposant n’est pas cette attitude figée qui consiste à défendre le faux ou à en faire usage pour tenter de convaincre des citoyens qui ne demandent qu’à être aidés pour faire face aux aléas de la vie. C’est une manière d’assumer – et de s’assumer – pour que le jeu de la démocratie se déroule sans porter atteinte à ce qui doit être le dénominateur commun entre tous les mauritaniens et qu’on appelle l’intérêt général. Pour cela, la politique doit passer au second plan quand une crise d’ampleur économique et sociale sans précédent menace la stabilité du pays, comme en ce moment où les prix flambent et où une crise politique implacable menace la paix sociale. Tout doit être mis en œuvre pour calmer la situation et faire face aux revendications qui fusent de tous côtés. En cela, le président a raison de « se féliciter » de la bonne marche du pays, parce que, jusque-là, son pouvoir a résisté au vent du changement qu’ailleurs on a appelé le « printemps arabe » mais il doit, aussi, savoir qu’une ouverture sur l’opposition est nécessaire pour sortir de la crise. Une reprise du dialogue, pourquoi pas ?

 

* Titre d’un roman de Tahar Ben Jelloun, paru en 1978.

Medsnib

Partagez